Le mikvé : une obligation avant l’accès au Temple

À l’époque du Second Temple, la montée au sanctuaire était strictement encadrée par les lois de pureté rituelle (tahara).
Tout Juif souhaitant entrer dans l’enceinte du Temple devait s’immerger dans un mikvé alimenté par de l’eau vive (eau de pluie ou de source), conformément à la halakha.

Cette exigence concernait :

• les pèlerins montant pour les trois fêtes de pèlerinage (Pessa’h, Chavouot, Souccot),

• les habitants de Jérusalem,

• les prêtres (Cohanim) avant leur service.

👉 Résultat : Jérusalem comptait des dizaines, voire des centaines de mikvé, concentrés autour des axes menant au Temple.

Une géographie sacrée autour du Mont du Temple

Les fouilles montrent une répartition très claire :

• au sud et à l’ouest du Mont du Temple,

• le long des routes de pèlerinage,

• sous l’actuelle place du Mur occidental (Kotel).

Cette densité exceptionnelle n’existe dans aucune autre ville antique du bassin méditerranéen. Elle confirme que Jérusalem n’était pas seulement une capitale politique, mais avant tout une ville-temple.

Chronologie des grandes découvertes

🔹 Premières fouilles (XXᵉ siècle – années 1990)

Les premières explorations archéologiques autour de la Vieille Ville identifient des mikvé datant de la période hasmonéenne et hérodienne (Iᵉʳ siècle av. J.-C. – Iᵉʳ siècle ap. J.-C.).
Ces bassins présentent déjà les caractéristiques halakhiques : marches d’accès, séparation de l’eau, bassins creusés dans la roche.

🔹 2018 – Découverte d’un mikvé sous la muraille du Mont du Temple

En 2018, une découverte capitale est annoncée :
➡️ un mikvé situé directement sous la muraille du Mont du Temple.

Les archéologues établissent que :

• le mikvé est antérieur à l’agrandissement hérodien du Mont du Temple,

• lors de l’extension monumentale de l’esplanade, la muraille a été construite en empiétant sur le bassin existant.

👉 Cette superposition architecturale fournit une datation incontestable et éclaire l’évolution du site sacré à la fin de l’époque du Second Temple.

🔹 Années 2020 – Fouilles sous la place du Mur occidental

Les travaux archéologiques menés sous la place actuelle du Kotel révèlent :

• plusieurs mikvé parfaitement conservés,

• des complexes de purification collectifs,

• des installations utilisées par des flux massifs de pèlerins.

Ces découvertes confirment que la zone située aujourd’hui au pied du Mur occidental était, il y a 2 000 ans, un espace de transition rituelle avant l’entrée sur le Mont du Temple.

🔹 Décembre 2025 – Une découverte bouleversante

Une annonce conjointe de l’Israel Antiquities Authority et de la Western Wall Heritage Foundation marque un tournant.

Un mikvé datant des tout derniers jours du Second Temple est mis au jour :

• dimensions : 3,05 m de long, 1,35 m de large, 1,85 m de haut,

• situé à quelques mètres seulement du Mont du Temple,

• retrouvé sous une couche de cendres, vestige direct de l’incendie et de la destruction romaine en 70.

Ce détail est crucial :
👉 des Juifs se purifiaient encore ici juste avant la chute de Jérusalem.

Les cendres : un témoignage historique unique

La présence de cendres n’est pas symbolique : elle est archéologiquement mesurable.
Elle relie le bassin à l’un des événements les plus traumatiques de l’histoire juive : la destruction du Temple par les légions de Titus.

Ces mikvé deviennent ainsi :

• des lieux de vie,

• des lieux de foi,

• et, paradoxalement, des lieux de mémoire de la destruction.

Une continuité religieuse jusqu’à aujourd’hui

Le mikvé n’est pas un vestige figé du passé. Il reste aujourd’hui au cœur du judaïsme :

• pureté familiale,

• conversion,

• préparation spirituelle.

Les mikvé antiques de Jérusalem montrent que ces pratiques ne sont pas des traditions tardives, mais des usages enracinés depuis plus de deux millénaires, précisément au cœur de la ville sainte.

Jérusalem, ville de la préparation spirituelle

Ces découvertes livrent une image saisissante de Jérusalem avant l’an 70 :

• une ville structurée autour du Temple,

• où la spiritualité se vivait par le corps autant que par la prière,

• où chaque montée vers le sacré passait par l’eau, la purification et l’intention.

Sous les pavés de la place du Kotel, ce sont les pas des pèlerins, leur attente et leur foi qui refont surface.

En conclusion

Les mikvé découverts à Jérusalem ne sont pas de simples bassins antiques.
Ils constituent :

• une preuve matérielle de la vie juive au Second Temple,

• un lien direct entre archéologie, halakha et histoire,

• un rappel puissant que Jérusalem était – et demeure – un lieu de préparation spirituelle avant la rencontre avec le sacré.